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  • Photo du rédacteurL'école de la Voie

Sous la Tente




SOUS LA TENTE -1-


Il fait nuit noire et le vent souffle sans répit.Recroquevillée sur mon lit de camp,

je me dis «oh non, ça ne peut pas recommencer!»

Dix jours plus tôt, nous campions sur la dune et la tempête a arraché notre tente

et tout ce qu'elle contenait, nous laissant sans abri. J'ai été renversée et blessé à la tête, terrorisée. Dix bons jours pour réparer, recoudre, faire de la «plongée» pour retrouver chaque jour quelques petites affaires, et pour enfin, à la grande fierté de mes parents, nous retrouver sur la dune, vaillants, intrépides, imbattables!

Il fait nuit donc et je crains le pire.


Toute la famille est réveillée et s'agite, c'est la tempête qui reprend.

Je suis si petite et si courageuse face à la terreur qui m'envahit et me submerge.

Du haut de mes six ans je crois avoir une solution pour nous sauver tous de cet enfer et je l'offre haut et fort, je me sens fière quand je suggère que chacun tienne de toutes ses forces un piquet de la tente... et c'est ce que je fais déjà ...... mais oser faire cette proposition ne m'amène qu'une terrible humiliation : on rit, on se moque, on ne me prend pas au sérieux.


L'humiliation ,sur le moment, je ne la sens pas vraiment, je la subis comme une sidération, tout est gelé en moi, mon regard est figé face à des milliers de regards froids, lointains.Je ne reconnais plus personne, les corps sont à des années lumières du mien, je me sens éjectée, propulsée vers l'arrière, littéralement exclue de cette communauté nocturne qu'est ma famille. Ma mère rit en nous faisant des tartines à la gelée de groseilles, je reste agrippée à mon piquet, ridicule et choquée, sans une larme, sans un cri, tétanisée, me sentant nue comme un vers.

SOUS LA TENTE -2-


Nous sommes en 2022.Allongée paisiblement au fond de mon lit douillet, je somnole et, sans crier gare, la scène me revient tout à coup. Recroquevillée sur mon lit de camp, prête à m'agripper à mon piquet, je me dis «non, ça ne va pas recommencer». Il fait nuit noire, le vent souffle avec violence, je ne bouge pas, j'attends la suite de l'histoire, je retiens ma respiration, je sens qu'il y a quelque-chose de différent. Dans l'obscurité , je bouge doucement sur mon lit de camp, je me tourne avec lenteur et je m'assieds délicatement, mes pieds s'enfoncent dans le sable tiède, j'écoute, j'observe la nuit, mes

sens tout ouverts à ce qui se passe autour de moi.


Au milieu de la grande tente, posée dans le sable, une petite bougie s'éclaire.

Juste le temps pour mes yeux de s'habituer un peu, la flamme vacille, devient de plus en plus chaude en couleurs et en luminosité et alors je m'aperçois que je ne suis pas seule.Je devine à travers les ombres et le tremblement de la bougie que des hommes et des femmes se tiennent assis là, par terre, dans le sable chaud.Je laisse les visages, les gestes et les regards arrivés jusqu'à moi et c'est alors qu'une vague de chaleur et d'amour m'envahit.


Je vous reconnais, vous, les humains du grand silence, vous êtes tous là avec moi

sous la tente, dans un unique regard enveloppant et soutenant.

Je me sens faire partie de la communauté, paisible, entière.

La nuit est calme et dense, le vent est parti soufller sa fureur vers d'autres contrées, emportant avec lui tous les piquets auxquels s'accrocher, tous les regards qui tuent, toutes les mères qui, une nuit de tempête, font des tartines en riant...

POUR CONCLURE


Entre les deux épisodes de la série «sous la tente», qu'a-t-il bien pu se passer ?

Il y a eu notre rencontre du grand silence où il m'a fallu beaucoup de courage

pour vous livrer dans le détail « ce petit moi blessé » (que je chéris oh combien!).

Oser me partager de la sorte dans le groupe, vous laisser voir la petite fille qui se débat en moi, lui accorder toute la place, avec votre soutien, cela m'a été un vrai baume,

un espace de guérison, de confiance.


Je suis heureuse de l'avoir fait, c'était ma façon d'apparaître.


Sarah

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